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RETOUR À MONTRÉAL ET DÉCÈS DE J.O. MARCHAND

Au retour à Paris ma mère souffrait de sa jambe. En février 1934 il y avait eu des troubles, mais ce n'était pas dans notre quartier.  Mon père nous a téléphoné; c'était un étonnement, car il fallait réserver le temps à la radio.  Il nous a dit qu’il ne pouvait venir en France.  Au mois de juin, il nous a annoncé qu'il avait pris nos billets de retour sur l'Empress of Britain.  Inquiet de la jambe de ma mère, il nous a fait voyager en 1ère classe ce qui me déplaisait, car il n'y avait pas de jeunes. J'allais en 3ème jouer au deck tennis, ping-pong et courses de chevaux ! Germaine était entourée des docteurs de la Broquerie, Fortier et Henri de Saint-Victor. Elle était très élégante, jolie taille et belle chevelure.  Elle fut gentille avec moi et aimait beaucoup ma mère.

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 L’Empress arriva à Québec.  Germaine Lavoie était au bateau.  Nous étions très déçues de ne pas voir mon père.  Nous avons pris le train pour Montréal.  Il n’était pas à la gare.  Taxi à la maison.  Quelle pénible surprise de le trouver au lit, malade depuis plusieurs semaines.  Il n’avait rien dit pour me permettre de finir mon année scolaire.  Inutile de dire que nous ne sommes pas retournées en France à l'automne, tel qu’il nous l’avait mentionné.  Cet été là, ma mère m’a amenée au Lac des Seize-Îles avec les Jean Asselin.  Elle est retournée à Montréal et m’a laissée quelques semaines avec Jean, Marthe et le petit Claude.  Je pense qu’il avait environ deux ans,  Je m’amusais avec lui.

Tante Germaine (Germaine Lavoie, fille d'Hélène Le Boutillier et du docteur Arthur Lavoie, donc cousine de Raymonde)

À l’automne, j’eus la chance d’avoir un professeur pour suivre mon cours par correspondance.  C’était une jeune fille qui avait terminé au Cours Désir.  Elle s’appelait Jacqueline Beaubien.  Elle avait 19 ans.  Elle voulait retourner en France pour devenir religieuse.  Elle aimait beaucoup ces dames du cours.  Elle habitait avec nous.  Sa mère était veuve ou divorcée.  


En janvier, nous sommes allées au sport d'hiver. Mon père choisit Mont-Rolland à cause de leurs amis, Olivier Rolland.  Nous étions à l'hôtel du village. Je travaillais mes cours le matin et ski l'après-midi. Souvent dîner le soir chez les Rolland. J'aimais bien Monsieur Rolland qui me faisait réciter des vers et des extraits des classiques. Il y avait beaucoup de va-et-vient. Les enfants, Lucien très taquin, Lantier très beau et romantique, Claire, la seule fille, avait beaucoup d'amis. Pierre Elliott Trudeau entre autres. Il y avait un oncle qui habitait à côté, Pierre Beaudry. Il était veuf avec deux petites filles. Il tomba amoureux de mon institutrice.   Pendant ce temps, je faisais du ski avec Lantier.  Mon père en eut des échos et les deux demoiselles ont été rappelées à la maison!..  Jacqueline épousa Pierre et je perdis mon institutrice.

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La santé de mon père se détériorait. Cirrhose du foie. Il voulait aller se faire soigner en France. Mais un spécialiste venu à Montréal en congrès vint le voir et lui assura qu’il n’avait rien d'autre à faire que le régime très sévère. Ma mère suivit le même régime pour ne pas lui rendre la chose plus pénible. Il avait des dépôts calcaires dans les yeux. Le docteur Mathieu venait à la maison toutes les semaines mais finalement il perdit l’œil. Il a dû avoir un œil de verre. Madame Janin fut très bonne pour lui. Il aimait aller s’asseoir dans son magnifique jardin rue Pagnuelo, dans sa chaise longue qui est dans ma chambre à Val Morin. Elle me fut offerte par Claire Janin Duranleau qui me dit nous l’appellerons la chaise de monsieur Marchand. Moi j’allais jouer au tennis avec Jacques et les Vaillancourt qui habitaient en face. Marie mourut dans les bras de Jacques. On me demanda pour être fille d’honneur au mariage de Michèle. Ce fut mon premier contact avec Marie Paule. Michèle. Josette, Hélène et Marielle Gohier étaient très grandes. Je me sentais petite à côté et beaucoup moins belle. Les robes étaient en piqué blanc avec yoke en organdi et de grands chapeaux en forme de marguerites comme nos bouquets . C’était ravissant! Lorsque vint l’automne 1935, mes parents, surtout ma mère, décidèrent de m’envoyer pensionnaire à Villa Maria. Je me suis senti très brimée er frustrée de ne pouvoir suivre mon cours par correspondance. J’étais dans une classe avec des élèves de mon âge, c’est-à-dire 14 ans. Ce fut un désastre au point de vue études. J’étais triste de ne pouvoir être auprès de mon père. Celui-ci était de plus en plus souffrant mais gardait un bon moral. Ma mère avait beaucoup de mérite. Les visites au parloir étaient pénibles. Je lui faisais des scènes et pleurais à chaudes larmes. Elle s’informa auprès de mes compagnes si j’étais triste en dehors du parloir. Elles la rassurèrent en disant que j’étais le boute-en-train. Un jour à la récréation je décidai d’aller à l’Institut Pédagogique, le Collège Marguerite Bourgeois, parler à mère Sainte-Anne Marie. Elle me reçoit gentiment. Je lui explique mon cas! Je déteste le pensionnat je ne vois pas mon père.  Ayant toujours des mauvaises notes de conduite, j’étais en retenue les jours de sortie!  Je veux suivre mon cours par correspondance.  Elle me demande de retourner au couvent et promet de faire quelque chose après les vacances de Noël.  En attendant, je passais mes journées à rêver de Lantier.  Nous entretenions une correspondance par l’entremise d’une élève externe.  Il était pensionnaire à Brébeuf.  Il m’écrivait des vers.  C’était pâââmant! selon l’expression du temps.  On dirait « cool » je suppose maintenant!  


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Fidèle à sa promesse mère Sainte-Anne me fait entrer pensionnaire de semaine au collège. Quelle joie! Elle m’attribue une religieuse épatante. Sœur Saint Stanislas. Aussi Judith Jasmin et je vais au cours d’anglais avec Labbé. Au réfectoire ce sont des tables de quatre. Je suis avec Liliane Savage, Gertrude de Coderre, Mariette Bourgeoys.  Elles devinrent mes amies intimes malgré qu’elles avaient 18 ans. La tante de Liliane sœur Marie Immaculée était prof de philo. Elle avait traduit les livres de l’abbé Filion du latin au français. Nous l’appelions la tante immaculée. J’étudiais dans ma chambre pendant les heures de cours. J’ai repris le programme du cours Désir du mois d’octobre et à Pâques j’étais à date.  

Malheureusement au mois de mai j’étais bien inquiète de la santé de mon père. Nous avions une excellente garde à la maison très douce. Bon soutien pour ma mère. Elles récitaient le chapelet ensemble. Garde Lavoie de l’Hôtel-Dieu.


Le 10 juin, je suis entrée dans la chambre de mon père en cachette. J’ai réalisé qu’il était dans le coma. Je suis rentrée au collège bouleversée. Liliane et Gertrude m’ont conseillé de retourner à la maison causer avec ma mère. J’ai réussi à la persuader de me laisser rester avec elle et Garde Lavoie au chevet de mon père. Son frère Arthur, avec lequel il entretenait des rapports assez distants, était venu le voir. Le lendemain matin, 11 juin, il est décédé sans reprendre conscience. Il fut exposé dans le salon avenue Wood. Ma mère et moi nous ne sommes pas allées aux funérailles comme c’était la coutume dans le temps. Nous avons regardé le cortège défiler de la fenêtre de la bibliothèque!

photo: Liliane Savage et Raymonde Marchand à Saint-Donat en juin 1936

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